C’est par la rue que toute opinion commence. De bonne heure, l’homme se lève pour aller chercher son pain ou son croissant. Rue, ou comptoir du zinc, c’est tout un. Ici affluent les premières nouvelles, s’échangent les premières impressions, naissent les premiers émois de la cité qui s’éveille. Tantôt les radios amplifieront la portée des nouvelles, le trottoir les colportera. Quelques uns s’assemblent au coin de la rue, au carrefour proche. Un cortège, peut-être, va se porter vers la mairie ou le commissariat. Ce qu’on apprend est-il vrai, est-il seulement plausible? S’il vous plaît, informez-nous. Nous sommes à l’écoute et nous y resterons autant qu’il faudra, jusqu’à ce que, apaisés, nous puissions rentrer à la maison. La rue nous appartient tout d’abord. Elle ne sera jamais à vous qu’épisodiquement, et à seule fin que vous nous assuriez de sa possession calme et paisible. Vous pouvez bien retourner à vos palais Nous ressortirons à notre aise si votre démocratie a le moindre sens.
démocratie, transparence
A la recherche de l’homme parfait
Qui cherche l’homme trouve l’humain.
A quoi bon dénoncer la faille? Elle est toute où est l’homme. De quel profit est la dénonciation sinon la gloire du dénonciateur et la prospérité suspecte de son journal? A tant harasser l’opinion, la presse lasse et le lecteur passe, indifférent, au prochain épisode. Aussi bien, il pardonne, de bon ou de mauvais cœur selon que l’honneur vrai est atteint ou seulement écorné.
Le maître a mille fois raison d’attendre et de laisser les lilliputiens stipendiés tendre leurs fils d’opprobre désiré sur les héros d’un jour. Le jour passe et demain, une faille cédant à l’autre, l’humain se reconnaîtra parmi les siens. A défaut d’homme parfait, il désignera l’honnête homme ajusté à sa mesure.
Un bluff sans calomnie
Mais non, voyons, Monsieur le candidat au pouvoir suprême, vous bluffez! Il n’y a pas, il ne peut pas y avoir de cabinet noir dans la galaxie Hollande! Voyez ce qu’en écrivent Ricasens, Hassoux et Labbé dans « Place Beauvau, les secrets inavouables d’un quinquennat« , éd. Robert Lafont, chapitre I. Dans la République pure et sans taches, il y a que des « blancs », ces notes blanches anonymes, sans en-têtes, qui circulent sous le manteau (« chut, je ne vous ai rien dit, vous ne le répéterez pas!… ») , ces renseignements occultes qui courent d’un service de police à un service judiciaire et réciproquement et qui, de proche en proche, renseignent sur le comportement des citoyens qu’on surveille pour remonter, quand celui-ci en a besoin, jusqu’au sommet de l’Etat. Mais ce n’est pas nouveau! Le système s’est répandu, dans la plus pure tradition de Fouché l’inexpugnable, repris de régime en régime par les républiques troisième et quatrième, continué sous la cinquième et il a suffi au dernier président d’embrayer sur la voie, et d’embaucher les serviteurs dévoués de ses prédécesseurs, pour perpétuer l’existence, tout en la niant la main sur le cœur, d’un cabinet noir au service de ses hautes oeuvres.
De là à établir qu’un circuit clandestin d’information a été spécifiquement dédié à vous compromettre, Monsieur le candidat, vous le prouveriez en vain, non plus, assurent les auteurs, qu’on ne pourrait jurer du contraire. Donc, vous bluffez, mais vous ne calomniez pas. D’un bluff sans calomnie, il reste forcément quelque chose.
Parole d’homme
Que j’aie commis une erreur, j’en ai fait l’aveu et présenté mes excuses.
Qu’on me l’impute à faute et m’incrimine, je le conteste, mais suis prêt à en répondre devant qui de droit. Si un juge veut me mettre en examen, je suis prêt à m’expliquer face à face devant lui.
Ainsi suis-je, en toute clarté, fondé à poursuivre et soutenir l’action dont je suis chargé en vue du bien public. Porteur d’un grand projet pour l’avenir de mon pays en péril, je ne saurais m’en démettre et jure de le soutenir jusqu’au bout de mes forces.
J’ai assurément le droit de m’opposer à quiconque veut le faire échouer ou m’en détourner. Aux inquisiteurs de la probité vétilleuse, j’ai le droit de rétorquer la parabole du jet de la première pierre. Aux talibans de l’ordre moral, je rappelle la sagesse universelle du Tao qui sait que de tout mal peut jaillir un bien.
J’en appelle au bon sens, si mal partagé ce temps-ci.
Au bal masqué des cloportes
Tandis qu’au bal masqué des nains et des cloportes, des stratèges attisent dans l’ombre le complot de la servitude satisfaite, le héros visionnaire assume sa vérité, choisit le courage et fait front. A ce signe combattant, les siens se reconnaissent et sonnent le rassemblement. Riches et pauvres, ils saisissent au rebond la chance promise de vaincre la fatalité de la misère, la faillite avérée, la violence et la haine, la hideur des charniers islamistes, la guerre nauséabonde, la menaçante submersion du monde, l’effondrement du ciel sous les nuées du ciel assombri. Il était temps.
Les dieux exaucent les combattants déterminés. De Gaulle chargé d’opprobre, appuyé par le peuple ragaillardi, soutenu par la finance opportuniste qu’il n’est ni temps ni avisé de dénigrer et répudier sous le prétexte d’une pureté qui n’existe nulle part en politique, a renversé la table fatale du destin. Contre tous les conservatismes. Faut-il tenir rigueur à l’homme d’un faux pas et de son repentir à l’heure du sursaut? Le poète retiendra d’abord la puissance du rêve.
Les Guêpes
Modèle du genre acclimaté au monde moderne, la démocratie athénienne mourut, entre autres causes, sous la marée des sycophantes.
Un sycophante était un dénonciateur public, citoyen commis par l’Etat à cette fonction. Pour une ou deux oboles, il avait à cœur de dénoncer, après quoi, payé de son prix, il s’en allait vaquer à ses affaires. Aristophane les a moqués, ces parasites agglutinés aux portiques, avides de purification, férus de transparence, insatiables saturateurs des rôles.
Les sycophantes dont parmi nous. On les appelle « les médias », stipendiés par un système dans lequel l’Etat trouve son compte. Pour un oui, pour un non, ils dénoncent, au tribunal de l’opinion faiseur de roi, à destination du tribunal diseur de droit, le forfait supposé du citoyen, le soupçon, le soupçon, encore le soupçon. Non pas pour une obole ou deux, mais pis encore, pour la gloire de faire tomber l’homme sous un faux-pas,- et le charger ou noircir fait partie de l’enjeu auquel, de proche en proche, le dénonciateur doit sa fortune et celle de ses commanditaires.
L’outrance, vice impuni de la vertu attachée à la dénonciation. La démocratie se perd en ces détours interminables qui l’éloigne de ses véritables intérêts et défis.