Goujat, goujate

Braver les codes et les rites d’un lieu saint est muflerie.

Les honnêtes gens ne comprendraient pas qu’un homme convié à une cérémonie de synagogue récuse le port d’une kippa, qu’un chrétien entrant dans une mosquée refuse de se déchausser d’abord, qu’un touriste agenouillé au pied d’un Bouddha affale devant lui le plat de ses sandales.

Qui ne se souvient de l’indécente impolitesse du président de la République française envers le pape François dans son ignorance crasse et peut-être affichée des codes établis de la préséance acquise au Souverain Pontife dans le siège de Rome?

Une femme publique française, catholique présumée, fait à un Mufti libanais l’affront assumé de refuser le port d’un voile à l’entrée de son sanctuaire. La même serait donc capable, en toute logique, de refuser de se couvrir la tête d’une  mantille à l’entrée du Saint-Siège? Elle qui pourtant, aura porté le voile pieux le matin de sa communion solennelle? Quel crédit pourrait porter à cette écervelée la masse des fidèles tentés un moment de se mêler à ses cortèges?

 

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Les émules

Cela se passe au collège des Jésuites dans les années 40. La classe est répartie en deux camps. Ce trimestre, ce sont les Scythes contre les Parthes. Chaque élève dans un camp a son émule dans l’autre. Ils rivalisent. Chacun dans son sillage a des suiveurs qui tentent de répondre à sa place aux questions du professeur et dans le camp d’en face son émule tente en premier de lui ravir la réponse. Ainsi, de proche en proche, par l’effet d’une stimulation générale, la classe progresse en efforts et en résultats.

Par exemple, chez les Scythes, l’adolescent Sarkozy a pour émule direct l’élève Juppé chez les Parthes: c’est à qui des deux donnera le premier la meilleure des réponses, soit une poésie récitée par cœur et sans monotonie, soit une erreur de grammaire rectifiée dans la réponse de l’émule, soit un point d’orthographe rectifié à la demande du maître. Quand ce sera le tour du Scythe Fillon, il faudra que Lemaire le Parthe tente de lui prendre l’avantage. A moins que du fond de la classe, ne surgisse l’inattendu Petit Chose qui vient à tous leur damer le pion. Ils ne sont pas des adversaires. Ils ne concourent à aucun avantage. Ils sont émules, cherchant le meilleur, chacun pour soi mais pour le succès et la gloire de tous. Ainsi va la République des Lettres, chez les Jésuites, dans les années 40.

Hitler Jugend

Qui est le plus criminel, de celui qui arme le bras d’un enfant et fait de lui le tueur d’un saint homme de prêtre, ou de celui, parent, instituteur, professeur, animateur, qui, oublieux de son devoir, n’a pas su ou voulu l’écarter de la voie du crime en lui insufflant de bonne heure le sens du bien et l’horreur du mal?

Est-il pire irresponsabilité que de ne pas éduquer, c’est à dire conduire un enfant vers la perfection de son humanité, de le laisser livré à lui-même, dans ses lubies ou ses rêves , dans l’inquiétude de ses frustrations, dans l’errance de ses essais sans assises, dans l’absurdité de son mal d’être? Faut-il s’étonner si, abandonné à ses maigres ressources, il s’en prenne à celui dont la probité, l’abnégation, la sainteté représentent l’idéal qu’il a pu rêver pour lui-même: plutôt détruire le symbole inaccessible de ce qu’on aurait aimé être et s’abolir soi-même pour ne plus y penser?

On ne se débarrassera peut-être pas des salauds qui font métier d’exploiter ces faiblesses pour bâtir des empires. Du moins doit-on tout faire pour tarir à la source le flux de leurs spadassins. Une sorte de Hitler Jugend s’est montrée aux portes de Damas. C’est grand pitié d’y voir parader tant de jeunes Français.